Le pronostic de ces affections a été radicalement modifié par la prise en charge actuelle orthopédique et chirurgicale de ces déformations.
La scoliose est un trouble de l’empilement des vertèbres.
Il s’agit d’une déformation permanente, les vertèbres se décalant en rotation les unes par rapport aux autres entrainant donc ce à quoi elles sont attachées, en l’occurrence les côtes au niveau thoracique ou les muscles au niveau lombaire.
La déformation persiste en position assise, couchée, debout, à la différence des attitudes scoliotiques qui disparaissent en position assise ou couchée et qui sont souvent la conséquence d’une inégalité de longueur des membres inférieurs.
Attitude scoliotique par inégalité des membres inférieurs
Notez la correction lorsque la talonnette est en place
L’origine des scolioses est multiple, elle peut être :
- congénitale : malformative (vertébre papillon, hémi vertébre)
- dystrophique : maladie de Marfan, maladie de Morquio, mucopolysaccharidose
- neurologique : infirmité motrice d’origine cérébrale ou paraplégie précoce
- la plus fréquente est celle que l’on appelle la scoliose idiopathique. Il s’agit d’une affection du rachis en croissance à prédominance féminine touchant environ un enfant sur 1000 à 1500. Son étiologie était auparavant inconnue. Elle est actuellement mieux comprise en particulier grâce aux travaux du Professeur Jean DUBOUSSET. Il s’agit d’une origine centrale neurologique multifactorielle, génétique, familiale, sous la dépendance de neurotransmetteurs centraux (sérotonine, mélatonine, hormones de croissance). Nous n’avons pas d’action actuelle sur cette cause. On ne peut traiter que la conséquence. Le port du cartable, les positions ou la pratique sportive n’ont aucune influence sur la survenue d’une scoliose.
Le port du cartable, les positions ou la pratique sportive n’ont aucune influence sur la survenue d’une scoliose.
Le diagnostic est facilement fait devant une adolescente examinée en position debout avec le dénivelé des épaules, une asymétrie de la taille et une gibbosité qui se majore et qui se voit bien lorsqu’on fait pencher l’enfant en avant, c’est d’ailleurs la base du test de dépistage scolaire systématique aux Etats-Unis.
Dénivelé des épaules
Asymétrie de la taille
Gibbosité
Scoliose et gibbosité très importante
Insuffisance respiratoire
Mesure de la gibbosité
Analyse de l’équilibre du rachis au fil à plomb
Les scolioses de l’enfant ne sont pas douloureuses à la différence de l’adulte. Toute douleur doit faire évoquer un autre diagnostic.
L’étude radiologique se fait sur un cliché grand format de face et de profil et surtout sur un EOS à l’heure actuelle, ce qui permet de diminuer l’irradiation reçue par les enfants.
On étudie :
- L’équilibre de face et de profil. En effet, une scoliose déséquilibrée de face va avoir tendance à s’aggraver.
- L’angle de Cobb, c’est-à-dire l’angulation entre les vertèbres les plus inclinées sur l’horizontale.
- Le degré de rotation vertébrale
- Courbure thoracique droite
- Courbure de compensation gauche
- Angle de Cobb = 85 °
- Scoliose équilibrée
- Test de Risser = 0
La Rotation des vertèbres fait la scoliose
Elle explique la gibbosité
Scanner d’une vertèbre scoliotique
montrant un angle par rapport
à l’axe normal du tronc
La maturité osseuse sur le test de Risser, c’est-à-dire l’ossification des crêtes iliaques sur une échelle qui comprend 5 stades, le test de Risser 1 correspondant à la fin de la croissance des membres inférieurs, à l’apparition des premières règles chez la fille et au maximum de vitesse de croissance rachidienne. Ceci permettra de poser les bases de pronostic.
Test de Risser
Permet de se situer dans la période de croissance du rachis
Le caractère rigide ou souple de la courbure (bending)
Le siège de la courbure peut être :
- Thoracique
- Thoraco lombaire
- Lombaire
- Double courbure, en général thoracique droite et lombaire gauche.
On distingue, en fonction de l’âge de survenue : Des scolioses juvéniles (jusqu’au moment des premières règles) Une scoliose de l’adolescence après les premières règles. L’évolution est fonction de la poussée de croissance péri pubertaire.
Il n’existe pas de traitement médical de la scoliose. La kinésithérapie est un appoint postural mais n’a pas d’influence sur l’origine de la courbure.
Schématiquement, le traitement peut être d’abord une surveillance en cas de courbure modérée, inférieure à 20°.
Si la scoliose est évolutive, on peut mettre en place un corset qui peut être un corset de nuit pour des angulations inférieures à 20-25° ou un corset à temps complet, c’est-à-dire 22h/24 pour des angulations importantes ou rapidement évolutives. Les corsets actuels sont en polyéthylène, légers, radio-transparents et invisibles sous les vêtements. Il est important de préciser que le corset ne fait que stabiliser la courbure à l’angle de prise en charge.
Lors de la mise en place d’un corset qui est un acte technique, une radiographie est effectuée et pour s’assurer d’une efficacité du traitement, il faut obtenir à la mise en place du corset une réduction de 50% de la courbure. Il s’agit d’un traitement rationnel qui a parfaitement fait sa preuve depuis plus de 50 ans (SALANOVA, MICHEL).
Réduction par corset
Le traitement par corset est à continuer jusqu’à maturité osseuse complète, c’est-à-dire jusqu’au test de Risser 5, un contrôle radiologique étant effectué en général tous les 6 mois pour éviter des irradiations excessives. Il n’existe aucune contre-indication à la pratique de tous les sports.
Cyphoses de l’enfant
C’est une exagération de la courbure physiologique du profil de la colonne dans son secteur thoracique le plus correct.
Elle affecte pendant la croissance vertébrale péri pubertaire essentiellement les garçons.
On parle de dystrophie vertébrale de croissance ou de Maladie de Scheuermann.
Outre son aspect inesthétique (dos vouté et arrondi), elle peut être douloureuse.
Précocement, elle est réductible puis peut entrainer sur les vertèbres en croissance des déformations irréversibles.
Le traitement en cas de déformation modérée et réductible repose sur la physiothérapie et la pratique sportive.
En cas d’aggravation ou de déformations importantes (avec fort retentissement cosmétique sur l’image corporelle), on peut envisager un traitement par corset. La clinique est rare mais possible consistant en une arthrodèse rachidienne étendue dans les cas les plus importants.
Cyphoses résistantes au traitement par corset
Traitement par arthrodèse postérieure T3-L3
La chirurgie peut se poser devant :
- L’échec de prise en charge du corset,
- Une angulation trop importante lorsque le patient est vu
- Le retentissement esthétique de la déformation.Généralement, il s’effectue à Risser 2 ou Risser 3, car la chirurgie va bloquer un certain nombre de vertèbres et il faut attendre un certain degré de taille du tronc obtenu afin de ne pas pénaliser en croissance le tronc.
Le traitement chirurgical est parfaitement codifié à l’heure actuelle. Il s’effectue sans hospitalisation préalable en centre de rééducation et nécessite une prise en charge anesthésique pré-opératoire :
Vérification de l’absence de foyer infectieux, ORL, urinaire, dentaire, dépistage de l’anémie pré-opératoire, bilan cardio-respiratoire.
Enfin les protocoles de récupération de RRAC sont appliqués.
Lors de l’anesthésie, le praticien placera une voie veineuse centrale (dans une grosse veine du cou) de façon à disposer en cas de problème de la possibilité de passer des produits rapidement et surtout en post opératoire, elle permet d’éviter les piqûres répétées et améliorer ainsi le confort du patient. On peut également par cette voie passer une nutrition parentérale hyper-calorique pour compenser le risque de dénutrition post opératoire. Une sonde urinaire est mise en place pour que l’anesthésiste puisse analyser le bilan entrée-sortie des liquides injectés. Une antibiothérapie prophylactique (préventive) est réalisée en pré-opératoire et toutes les deux heures d’intervention. Un système de réchauffement per opératoire du patient est mis en place pour éviter l’hypothermie et on vérifie l’absence de compression du patient sur la table spécifique (coudes, yeux, abdomen).
L’intervention est conduite sous hypo-tension contrôlée dirigée par l’anesthésiste en fonction de la pathologie cardio vasculaire du patient, ceci pour éviter les risques d’hémorragie. Enfin, avant l’incision l’anesthésie intra-thécale (injection de morphine dans le liquide céphalo-rachidien par voie lombaire) est effectué de manière à éviter pendant la première journée des douleurs importantes.
La stratégie pré opératoire est basée sur l’analyse des clichés EOS et de nombreuses classifications ont été publiées et sont utilisées (LENKE, SALANOVA). Ce traitement est complexe mais chez une équipe entrainée dans un centre multi disciplinaire, c’est une chirurgie qui est très codifiée.
Détermination des vertèbres stratégiques pour établir la stratégie opératoire
Elle s’effectue généralement par voie postérieure. La voie antérieure est plus rarement indiquée et ne s’adresse qu’aux courbures excessivement importantes ou les rigides.
Correction par arthrodèse postérieure – Thoracoplastie
Cyphose thoracique traitée par arthrodèse postérieure
Visualisation de la greffe par scanner – Nappe osseuse continue unissant les vertèbres
Une thoracoplastie est quelquefois associée, c’est-à-dire que la gibbosité est enlevée, surtout pour améliorer l’esthétique. Il s’agit d’une intervention qui est effectuée dans le même temps opératoire et qui permet une amélioration esthétique considérable.
En post opératoire, le malade est en soins continus pour 24 à 48 heures. Le lever est précoce le jour même, le corset est souvent non nécessaire. La sortie s’effectue au 8ème ou 10ème jour sans centre de rééducation nécessaire.
La reprise de la scolarité peut s’effectuer à un mois un mois demi après. Les sports sans contact sont autorisés entre 4 et 6 mois et les sports contacts à un an.
Les résultats à long terme sont excellents d’après les symposiums sur les chirurgies de scoliose à 20 ans de recul (GES).
Une surveillance à long terme est nécessaire, généralement tous les ans pendant trois ans puis une fois tous les trois à cinq ans pendant toute la durée de la vie.
Les Risques
Certains sont spécifiques à cette pathologie. Ils dépendent essentiellement de l’importance de la scoliose, de la cause et de l’état général. Il est très difficile d’être complet dans la description de toutes les complications, d’autant que certaines peuvent être inconnues à ce jour.
- La paralysie des membres, partielle ou totale, temporaire ou définitive est rare voire, très rare. Des appareils de surveillance du fonctionnement de la moelle épinière sont utilisés pendant l’opération : ils permettent de réduire considérablement la fréquence (moins de 1%) et la gravité de leur survenue.
- L’évolution de la scoliose au niveau opéré peut se rencontrer surtout chez le jeune enfant et nécessiter un complément de greffe car la croissance du rachis continue.
- Le lâchage d’un crochet ou l’arrachement d’une vis peut survenir précocement et obliger à une intervention pour sa remise en place.
- La non consolidation de la greffe peut parfois être conservée plusieurs mois ou années après l’opération, surtout chez l’adulte et entrainer la rupture des tiges. Une nouvelle greffe est le plus souvent nécessaire.
- La survenue d’une arthrose ou d’une déformation évolutive au-dessus ou au-dessous de la greffe plusieurs années après l’opération est possible. Une extension du montage peut être proposée.
Patiente 15 ans
Scoliose à bassin inclus
Arthrodèse T3 – L3
Correction complète
Patiente 14 ans
Scoliose déséquilibrée
Correction complète et rééquilibrage
Patient 13 ans
Scoliose neurologique
Établissement de la stratégie opératoire
Recul actuel 29 ans
Patiente 18 ans
Modélisation de la déformation par imprimante 3D
Cypho-scoliose majeure
Correction par résection corporéale de T 10
Arthrodèse T3 – L3
Thoracoplastie associée
Excellent résultat
Retour à une vie normale
Pour plus de renseignements concernant les techniques chirurgicales et les risques opératoires, veuillez consulter les fiches d’informations spécifiques de la Société Française de Chirurgie Rachidienne